Les recueils des petits plaisirs de Philippe Delerm sont des moments attendus que l'on croque avec gourmandise, comme un navet fraîchement épluché et volé en douce.
Le petit dernier, Les eaux troubles du mojito et autres belles raisons d'habiter la terre, ne faillit pas à la tradition. Il décortique ces instants qui font sourire, à côté desquels il serait dommage de passer sans s'arrêter, avec une pointe de nostalgie et la promesse d'y être désormais plus attentif.
Où l'on observe mieux le mensonge de la pastèque, un enfant absorbé dans sa lecture, ceux qui dansent comme des ours, une halte le temps d'une averse, un long dimanche à la plage ou au vide-grenier, les murmures de Venise, la vie des natures mortes, le plaisir d'en rajouter une couche (de peinture), le nom des journalistes de radio, l'art de boire un spritz ou un Guignolet ou un mojito, la fragilité d'une belle soirée d'été, un train bondé en période de grève, l'été indien en Provence, une réunion guindée ajournée, la première page de Blake et Mortimer et la dernière d'Astérix, toutes celles du Journal de Tintin, les pianistes de gare, les danseurs de tango, la vue d'avion du troisième balcon, les traces de Monsieur Hulot, une échappée belle à l'entracte, une escale en aire d'autoroute, le farniente des vacances, l'amour qui brille sur les ponts de Paris, les sourires à la sauvette, les noms des jardins ou des places qui en disent long, le souvenir d'une voix, le passage d'un avion publicitaire le long des plages et, pour finir, un baiser.
On ne s'en lasse pas.
Éditions du Seuil, 2015, 124 pages.
Quelques pages lues par l'auteur sur France Culture.
Voir aussi mes chroniques sur :
- Elle marchait sur un fil
- Je vais passer pour un vieux con et autres petites phrases qui en disent long
© Portrait de Philippe Delerm par Hermance Triay.
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