dimanche 23 novembre 2014

C'est du Zola !

Les éditions du Sonneur, dans leur Petite Collection, présentent quatre nouvelles d'Émile Zola Comment on se marie : dans les milieux aristocratique, bourgeois, commerçant et artisan. C'est un regard critique sur le mariage et sur l'amour, sur les conventions sociales dans différents milieux. Et forcément, comme c'est du Zola, c'est plutôt noir, même si certains y voient de l'humour... noir. Dans l'introduction aux nouvelles il écrit notamment :
"Il est une autre cause aux fâcheux mariages d'aujourd'hui, sur laquelle je veux insister, avant d'arriver aux exemples. Cette cause est le fossé profond que l'éducation et l'instruction creusent chez nous, dès l'enfance, entre les garçons et les filles."
"Quel étrange système, partager l'humanité en deux camps, les hommes d'un côté, les femmes de l'autre ; puis, après avoir armé les deux camps l'un contre l'autre, les unir en leur disant : "Vivez en paix !""
Dans Comment on meurt, même principe : quatre nouvelles sur l'agonie, la veillée, la mort, les funérailles d'un noble, d'une bourgeoise, d'un fils d'ouvrier et d'un paysan. Et là, encore, l'inégalité est d'autant plus criante selon que l'on est fortuné ou non. Noir, très noir.

Éditions du Sonneur, La Petite Collection.

Lire aussi ma chronique sur d'autres titres de la Petite Collection des éditions du sonneur, dont Comment écrire un livre de voyage.

mercredi 19 novembre 2014

Le petit guide design, beau et pratique

Pour tous ceux qui s'intéressent aux objets design, voici un sympathique petit guide qui répond à la question de son titre : Pourquoi est-ce un chef d'œuvre ? de Susie Hodge, aux éditions Eyrolles.
"Les beaux objets ne manquent pas, les objets fonctionnels non plus ; néanmoins peu réunissent ces deux conditions. Le chef d'œuvre est l'objet qui emplit sa mission à tous les niveaux, notamment en accédant à une forme de perfection, tant dans son aspect que dans sa fonction.
Le design est un rouage essentiel de la société, en ce sens qu'il transforme la façon dont nous vivons et travaillons. L'appréciation d'un design réussi dépend de divers paramètres : les origines culturelles, raciales et sociales, le cadre de vie, les sensibilités individuelles, l'âge, mais aussi la compréhension personnelle des éléments contribuant à rendre un objet esthétiquement fonctionnel. Certains produits doivent attendre des années avant d'acquérir une signifiance culturelle ; d'autres, au contraire, ont tendance à perdre leur pertinence au fil du temps et des situations économiques ou politiques."
Les grands noms du design d'hier et d'aujourd'hui sont évoqués à travers 80 produits emblématiques (l'épingle à nourrice de Hunt, le flacon de parfum N°5 de Chanel, en passant par la chaise Fourmi de Jacobsen ou le IPhone de Ive), chefs d'œuvre du XVIIIe à nos jours, en une dizaine de thématiques : beauté, originalité, forme, fonction, expression, mouvement, impact, quotidien, communication, harmonie.
Chaque objet a sa propre histoire et croise la nôtre.

Bref, un guide qui répond parfaitement aux exigences du design réussi : aussi beau que pratique ! 

Éditions Eyrolles, 2014, 224 pages, format 18,5 x 13,5
Dans la même collection Pourquoi est-ce un chef d'œuvre ? existent aussi quatre autres ouvrages sur la photo, les tableaux et sculptures, les créations de mode, les longs métrages d'animation...

dimanche 16 novembre 2014

Une chute capitale

Robert Goolrick nous a déjà donné des livres puissants, impossibles à lâcher, notamment Féroces.
Cette fois, avec La chute des princes, il s'attaque aux golden boys, princes du New York des années 80 (quand la ville était "sale, dangereuse et géniale"), ces fameux loups de Wall Street, dont l'unique but était de gagner un maximum d'argent en un rien de temps, sans se soucier ni de l'avenir ni des autres. Et pour cela, brûler ses ailes et sa vie par les deux bouts, à toute allure, jusqu'aux derniers excès ; chercher le plaisir partout, consommer à n'en plus pouvoir, abuser des drogues, de l'alcool, des filles, du luxe... jusqu'à la frénésie, le paroxysme, et pour finir la mort prématurée : overdose, suicide, sida, burn out... Tout cela, le cinéma et d'autres écrivains de sa génération l'on déjà raconté. Mais pas de cette façon si sensible et éclatante pour nous projeter dans cette chute vertigineuse.
Le narrateur est un rescapé de cette époque et raconte sa rédemption. L'auteur s'inspire de sa propre expérience dans la publicité : il a vécu cette période effrénée et s'est fait virer du jour au lendemain, sans revenus.
C'est ainsi que Robert Goolrick est devenu écrivain. Et quel écrivain ! Assurément un des plus talentueux des États-Unis.

Éditions Anne Carrière, 2014, 360 pages. 

Voir aussi mes chroniques sur :
- Féroces.
- Une femme simple et honnête.

vendredi 14 novembre 2014

Les plus belles photos de nature

Les éditions Biotope publient la version française du beau livre retraçant les 50 ans d'images du concours international Wildlife Photographer of the Year (organisé notamment par le Natural History Museum de Londres) : L'art de la photographie de nature.
Les textes de Rosamund Kidman Cox replacent dans leur contexte chaque photo et abordent différents sujets sur la photographie naturaliste et des photographes spécialisés, tels que : les débuts et l'évolution de cet art, l'œil de l'artiste, la lumière, le bon moment, la connaissance des paysages naturels et des animaux, les grands espaces et le minuscule...
Les photos récompensées et présentées reflètent l'immense diversité de styles, de techniques, d'approches de cette discipline.
Un livre grandiose et fascinant sur les animaux et la nature.

Éditions Biotope, 2014, 29 x 29 cm, 252 pages.
Photo de couverture : Jim Brandenburg (États-Unis).

Ci-contre, © Léger mouvement de queue, de David Lloyd (Nouvelle-Zélande).
Ci-dessous : Les profondeurs de Danakil, de Olivier Grunewald (France).
Le lancement officiel se fera lors du festival de la photo animalière de Montier-en-Der (Haute-Marne), du 20 au 23 novembre 2014, où Rosamund Kidman Cox dédicacera l'ouvrage.

lundi 10 novembre 2014

Un p(r)o(bl)ème = une solution

Il y a les études scientifiques d'un côté (page de gauche) et les poèmes de l'autre (page de droite ou suivante). Partant du constat que "les études scientifiques ça va bien deux minutes" et qu'un poème vaut mieux qu'un long discours scientifique — pas toujours pertinent —, les éditions Le Contrepoint ont eu l'idée amusante de placer en parallèle un problème et un poème (il suffit de retirer quelques lettres et la magie opère). Autrement dit, n'y allons pas par quatre chemins et moquons-nous des soi-disant vérités scientifiques avec de petits joyaux de la poésie, plein de bon sens, de grâce et de nuances.
"Américaines bien souvent, à la con en majorité, les études scientifiques ont un principe de base implacable qui consiste à : I - poser le cadre d'un protocole permettant de tout mesurer (c'est scientifique) ; II - en étendre le résultat à la population mondiale ; III - en tirer des conclusions débiles."
Quelques exemples de ces études indispensables (imaginez la boîte à rire à la fin de chaque énoncé) : gagner moins d'argent que sa femme rend fidèle ; les relations amoureuses à distance durent plus longtemps ; les enfants qui regardent trop la télévision finissent en prison à l'âge adulte ; plus on est vieux moins on a envie de vieillir... Bref, des recherches dignes du Prix Ig Nobel qui récompense les études les plus absurdes, drôles ou farfelues.
"... ou comment résoudre tous vos poèmes en récitant un petit problème. Et vice versa."
 Ouf ! un peu de poésie dans ce monde de blouses blanches !

Éditions Le Contrepoint, Collection Poésie Pratique, 2014, 48 pages.

jeudi 6 novembre 2014

La magie de l'amour

J'attends toujours avec impatience la sortie d'un nouveau film de Woody Allen. Je n'ai pas été déçue avec Magic in the Moonlight.
Il y a un personnage cynique, désabusé, désillusionné, avec des répliques tellement drastiques qu'il en devient comique. Ironie du sort, ce personnage est un illusionniste qui se cache derrière un personnage et un pseudo chinois. Il y a une jeune fille ravissante et douée pour épater la galerie et faire rêver les autres. Il y a des paysages idylliques de la Côte d'Azur, des villas somptueuses, des voitures de rêve et des coupes de champagne.
Il y a les croyances, qui sont peut-être des illusions mais, qui aident à lutter contre l'angoisse de la mort et de l'absurdité de notre passage sur terre. Il y a les contradictions de chacun entre rationalité et folie douce. Il y a la magie du parfum des roses, des étoiles dans le ciel, du sourire des autres...
C'est drôle, c'est touchant et ça fait réfléchir sur des sujets graves et insupportables — la mort, par exemple  — et le sens de la vie.
Merci Woody !

mercredi 5 novembre 2014

Pour voir plus loin

Jean Claude Ameisen est surtout connu du grand public pour son excellente émission sur France Inter Sur les épaules de Darwin, où il aime tisser des relations entre la science, la littérature, la poésie, la philosophie et la société, avec un timbre de voix et un tempo envoûtants.
Deux ouvrages ont déjà été publiés d'après cette émission : Les battements du temps et Je t'offrirai des spectacles admirables. Voici le troisième volet consacré à nos origines : Retrouver l'aube.
Le style est celui des contes, comme Sur les épaules de Darwin, et pourrait débuter par il était une fois, à la manière des rites de transmission orale.
"Dans chaque peuple, dans chaque culture, dans chaque région de chaque continent où nos ancêtres ont posé le pied, il y a des récits qui disent le commencement du monde"
Jean Claude Ameisen nous raconte des histoires fascinantes, fantastiques et véridiques basées sur les toutes dernières avancées de la science et de la recherche : un véritable voyage à travers les âges et les mondes perdus qui sont à nos origines, pour retrouver l'aube, selon la phrase de Pascal Quignard : "Retrouver l'aube, partout, partout, partout".
Une lecture aussi instructive que réjouissante.

Éditions Les Liens qui libèrent, 2014, 448 pages. 

lundi 3 novembre 2014

Un regard si doux

L'exposition de photographies de Raymond Depardon, Un moment si doux, qui se déroule jusqu'au 2 mars 2015 au Mucem à Marseille, propose un parcours dans l'œuvre et la vie de l'artiste depuis les années 50 avec 137 photographies en couleur, dont 40 spécialement réalisées pour l’exposition et 23 prises à Marseille.
Son regard — un regard si doux — s'attache surtout aux scènes de la vie quotidienne, voire ordinaire, dans la rue ou dans les cafés. Parfois seule une touche de couleur vive illumine le cadre, attire l'œil, et la poésie jaillit.
À cette occasion, les éditions Xavier Barral coéditent Méditerranée, un beau livre de 82 photographies prises sur le pourtour méditerranéen, dont celles prises à Marseille en 2014.
Un beau texte de Claudine Nougaret, Carnet de voyage, accompagne le photographe dans les rues de Marseille et commence par :
"J'aime marcher dans les rues de Marseille, être saisie par la violence du vent pour mieux me perdre dans le bleu du ciel. J'aime m'abriter sous l'ombrière du quai de la Fraternité, écouter les exclamations des touristes, le brouhaha de la ville."

Légendes photos :
Ci-dessus : 1998, La Vieille Charité, Marseille.
Ci-contre : 2014, Quai de la Joliette, Marseille.
Photographies © Raymond Depardon / Magnum Photos

Coédition Xavier Barral et Le Mucem, 2014, 
112 pages.
Lire aussi ma chronique sur Profils Paysans.