lundi 3 août 2015

L'envoûtement de Carole M.

Au début, l'univers de Carole Martinez peut surprendre, avec ce style unique, poétique, fantasque et fantastique, d'une autre époque, moyenâgeuse pour La terre qui penche, son troisième roman. Or, il suffit de passer un sas — quelques pages à peine —, et les phrases travaillées, le vocabulaire daté, l'histoire crue et cruelle, créent une atmosphère de conte qui pénètre et envoûte, à notre insu.
L'épopée se brode et se tisse vers 1630, en pays Comtois, où l'on retrouve le Domaine des Murmures, cadre du deuxième roman de l'écrivain qui se passait au XIIe siècle.
Le texte chante et danse, rythmé de comptines, chansons de geste et airs de caroles (danses du Moyen Âge).

Deux narratrices alternent, Blanche, une petite fille, et sa vieille âme. Parmi les personnages hauts en couleurs et forts en caractères — dont un ogre bien réel et une sirène de rivière —, on croise des chevaliers, des serfs, des sorcières et des femmes en butte au pouvoir des hommes. Mais parfois, les hommes éprouvent des sentiments et une petite fille peut échapper à l'ogre...
 "Il est mort, la face contre terre, mort, une épée inutile au côté, mort, et je me souviens même qu'il a pleuré avant de s'affaisser sur son gros caillou, pleuré de tristesse à l'idée de quitter ce monde formidable où tout est possible pour un géant en armes, où la violence l'emporte le plus souvent, où les enfants perdus dans les bois n'ont aucune chance de passer la nuit s'ils ignorent qu'ils peuvent être chardons."
De secrets de familles en batailles de fiefs, de mariages forcés en amours clandestines, la petite Blanche grandit, apprend et découvre le monde des adultes.

Éditions Gallimard, 2015, 368 pages.

Le  premier roman de Carole Martinez, Le cœur cousu, a remporté de nombreux prix littéraires et rencontre toujours un beau succès, avec déjà ce style de conte fantastique qui mêle la légende à la vie réelle de l'aïeule espagnole de l'autrice, jouée et perdue au jeu par son mari.


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