Voilà un véritable manifeste pour un VRAI roman érotique.
Vu le titre — Lettre à celle qui lit mes romances érotiques, et qui devrait arrêter tout de suite — Camille Emmanuelle s'adresse à ces innombrables lectrices qui font la prospérité des maisons d'édition spécialisées dans la romance érotique. Je ne suis pas sûre que cette prétendue cible lise cet essai remarquable d'humour, et je le regrette, mais les autres apprécieront : les dessous de la romance érotique ne sont pas aussi chic qu'elles le clament.
Le long titre est explicite : l'autrice a écrit des romances érotiques à la chaîne, formatées au millimètre, bien proprettes et glamour, sous pseudo américain avec une fausse biographie, et nous dévoile les coulisses de cette industrie de l'édition rose — pas si rose, donc —, cette machine à fric avant tout, et à l'idéologie rétrograde.
Car c'est bien ce qui a excédé Camille Emmanuelle, spécialiste des questions de sexualité : à force qu'on corrige ses textes, dans les moindres détails de l'intrigue, ce petit jeu (un travail alimentaire avant tout) a cessé de l'amuser. Trop c'est trop.
Ces bluettes sont si érotiquement correctes qu'elles en deviennent politiquement abjectes, prônant des normes sexuelles d'une autre époque et des fantasmes misogynes et débilitants — façon Barbie et Ken. On prend vraiment les lectrices pour des oies blanches !
Cet essai très bien écrit et instructif serait extrêmement drôle si les questions soulevées n'étaient pas si révoltantes. Un jubilatoire pamphlet contre l'érotisme gnangnan.
Les Échappés, 2017, 144 pages.
Voir le site de Camille Emmanuelle, ses activités, ses autres publications.
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