"Pris entre le marteau de la pauvreté comme échec moral personnel et l'enclume de ce miroir aux alouettes qu'était la récompense matérielle d'une citoyenneté à laquelle ils ne pouvaient jamais prétendre, ils étaient des réprouvés partout où ils jetaient l'ancre. Toute leur histoire était un kaléidoscope insensé de faits, de fantasmes sur grand écran, de mensonges de protection instinctifs et de vérités un peu arrangées pour entrer dans le moule d'un rêve américain modeste et présentable."Un jardin de sable de Earl Thompson est un livre monstre de 832 pages — monstrueux et beau à la fois, d'une épaisseur impressionnante, qui vaut son pesant de littérature.
L'objet brut à la couverture cartonnée et gravée, soigneusement peaufiné comme Monsieur Toussaint Louverture sait le faire, est un choc, un monument de la littérature américaine des années 70, loin du rêve américain.
Dans l'univers et la trempe, on est proche de John Fante, Charles Bukowski ou Donald Ray Pollock qui se contente de signer la préface, lui qui rêvait d'écrire la biographie de l'auteur. "Qui sait, si je n'avais pas les livres d'Earl Thompson, je n'écrirais peut-être pas aujourd'hui", avoue-t-il.
Ce premier roman très autobiographique, pour ce qu'on sait de la vie de Thompson, est le récit plus que chaotique des premières années de Jack, de sa naissance dans le Kansas jusqu'à son enrôlement dans les Marines bien avant l'âge requis, alors qu'il n'a même pas 14 ans. Rien ne lui sera épargné dans cette famille en perpétuel naufrage, mis à part le seul repère positif assuré par les grands-parents.
Un cocktail brut et explosif de misère, d'injustice, de violence, de délinquance, de déchéance, d'errance, d'alcool, de sexe...
Âmes sensibles s'abstenir. Amateurs de littérature se précipiter.
Éditions Monsieur Toussaint Louverture, traduit de l’anglais (États-Unis) par Jean-Charles Khalifa, préface de Donald Ray Pollock, 2018, 832 pages.
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