Trois étés plus tard, dans les mêmes conditions fulgurantes, sans signes avant coureurs et sans merci, c'est mon ami André qui disparaît. J'ai donc cherché dans ma bibliothèque un livre qui irait dans le sens de mes états d'âme.
J'ai retrouvé Le bleu de la nuit de Joan Didion. Après L'année de la pensée magique (lire ma chronique) qui rendait hommage à son mari, je savais qu'elle y parlait de sa fille adoptive, décédée alors qu'elle n'avait pas 40 ans.
L'écriture est sans pathos, pudique, mais se veut directe. Elle est d'une profonde acuité, hantée par certains souvenirs ou par des bouts de phrases prononcées, entendues. Les confidences reviennent par petits coups délicats compléter — préciser — les précédentes et abordent des sujets complexes, comme ses impulsions confuses autour de l'adoption.
C'est comme quand quelqu'un meurt, mieux vaut ne pas s'appesantir dessus.Mais Le bleu de la nuit n'est pas seulement dédié à sa fille. Faisant référence à la mort des proches qui partent avant nous, alors que cela n'était pas censé arriver, Joan Didion parle de la solitude et de la vieillesse, ce crépuscule bleu de la vie où il n'est pas de bon ton de se plaindre alors que l'on décline, que tout se dérobe autour, qu'on se sent vulnérable, fragile, et qu'il n'y a plus personne à appeler en cas d'urgence.
Et par ce livre, la journaliste et romancière américaine — une icône outre-Atlantique — voulait prouver encore une fois qu'elle était capable d'écrire une histoire vraie.
Je me suis juré de garder le cap. "Garder le cap" était l'impératif qui se réverbérait en écho jusqu'à l'autre bout de la ville. En vérité je ne savais pas du tout ce qui se passerait si je n'y arrivais pas. En vérité je ne savais pas du tout ce qu'était le cap.Éditions Le Livre de poche, 2014, 224 pages (éditeur d'origine Grasset).
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