dimanche 7 février 2016

La meilleure part de nous-mêmes

Dans L'ombre de nos nuits de Gaëlle Josse, la narratrice entre dans un musée pour passer le temps et reste sidérée devant le chef-d'œuvre de Georges de La Tour : Saint Sébastien soigné par Irène. Cette femme penchée tendrement sur un homme blessé lui rappelle une histoire d'amour qui hante encore sa mémoire.
Les chapitres se succèdent entre l'histoire tourmentée et passionnante du tableau — et celle du peintre et de son entourage — et les souvenirs tourmentés et passionnés de la narratrice. Peinture et littérature. Passé et présent. Tourments et passions.
Tu m'aimais beaucoup. Tu ne m'aimais pas. Je pensais que ce terrible mot de trop finirait par disparaître. Je t'aimais tellement qu'il ne pouvait en aller autrement.
Gaëlle Josse, tout en poésie et justesse, met en lumière, malgré leurs zones d'ombre, ceux qui donnent le meilleur d'eux-mêmes pour une cause personnelle et inexplicable, une passion, un art, un amour.
Je regarde le visage attentif, amoureux, d'Irène. Ma seule certitude, maintenant que le temps a apaisé ce qui devait l'être, est de t'avoir offert la meilleure part de moi-même, et de te garder, par-delà ce qui me semble des siècles, une ineffaçable tendresse. Je n'ai pas réussi à te donner l'envie de m'aimer ni celle d'être heureux. Tu étais seul à écrire ton histoire. J'ai tout éprouvé avec toi. Après la joie, le plaisir, le ravissement, il y a eu de la place pour la déception, le doute, la colère, le dégoût, la lassitude, la tristesse. J'avais fui, comme toi-même tu avais fui une autre histoire. Je repartais seule, blessée de ce que nous avions vécu. Ou bien étais-je seule à l'avoir vécu ?
Et par-delà ces récits croisés, bien sûr, un parallèle se dessine entre le travail du peintre et celui de l'écrivain, par petites touches de couleurs, d'émotions posées sur la toile ou la page, pour livrer le meilleur d'eux-mêmes.

Éditions Noir sur blanc, collection Notabilia, 2016, 192 pages.

Des extraits de ce roman seront lus à haute-voix par le collectif Les Livreurs lors du Bal à la Page du 14 février.

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