Oui, on en sort groggy par la défonce à l'alcool et au hash, étourdi par l'ennui, l'inaction forcée et la dépression, tendu par l'hystérie, figé par la peur jusqu'à la paranoïa d'un contrôle de police ou d'une expulsion, en attendant le verdict d'un dossier qui n'en finit pas de ne pas être traité.
L'attente, la promiscuité et le désespoir rendent fous les exilés du camp qui cherchent à survivre, à échapper à cette réalité injuste, absurde, insalubre : ils inventent de petites combines et de gros mensonges, poursuivent des chimères, rêvent de passeports, de terres promises, d'Amérique, de voyages, de mariages... alors qu'ils sont englués, les deux pieds dans la boue d'une impasse hostile.
J'étais, à l'époque, obtus et écrasé au point de ne pas voir combien Hanumân avait peur de se retrouver seul en face de cette vérité : il se mentait à lui-même, encore plus qu'il ne me mentait à moi ! Car tromper autrui, ce n'est que faillir à demi ; tandis que se tromper soi-même, c'est très grave ! Et comment tromper autrui sans se tromper soi-même ; la faute commence là où commence la corruption de l'âme. Quand on entre en débat avec son âme, les yeux dans les yeux. Si alors on triche, si on la chiffonne, cette âme, jusqu'à en faire un simple mouchoir, tôt ou tard on se mouchera dedans. Oui, on se mouchera dans son âme.Ce roman picaresque donne un point de vue des conditions de vie quotidienne des camps, ces ghettos aux conditions infernales et impitoyables qui me rappellent l'effroyable Nuit d'Edgar Hilsenrath.
Éditions Le Tripode, 2016, 440 pages.
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