J'aurais adoré être chanteur. Je me suis récemment mis au piano. Je prends des cours et peux m'accompagner par cœur sur Je suis malade. Je l'ai chanté à ma mère lors de son dernier séjour chez moi. À la fin de ma prestation, après un silence de quelques secondes, elle a levé la tête du dernier catalogue Leroy Merlin et m'a demandé : "Tes voisins ne rouspètent pas ?"Voilà un excellent petit livre, dense et violent comme un coup de poing, mais aussi plein d'humour, qui se lit d'un trait avec beaucoup d'intérêt. Mon père, ma mère et Sheila est le premier roman d'Éric Romand.
Le narrateur raconte à la première personne ce qui semble être sa propre enfance lyonnaise dans les années 70 et 80, en courts paragraphes indépendants d'une extrême précision, avec de nombreuses références aux objets populaires emblématiques de l'époque. En quelques lignes, les souvenirs sont décrits avec distance et parfois sur un ton pince-sans-rire qui ne cherche jamais à enjoliver : tour à tour ironiques, crus, effroyables, rarement nostalgiques (sauf lorsqu'il s'agit de ses grands-parents épiciers), avec des détails ou dénouements incongrus.
Par fragments, on découvre le mode de vie de ses parents issus de la classe ouvrière : la violence du père, la froideur de la mère, les goûts musicaux de l'époque (dont Sheila, en première ligne), les penchants sexuels du narrateur, son entrée dans la vie professionnelle...
Le procédé des fragments autobiographiques et le ton distancié rappellent Valérie Mréjen dans Mon grand-père, L'Agrume et Eau Sauvage ; mais aussi Grégoire Bouillier dans Rapport sur moi.
Une belle surprise de la rentrée littéraire.
Éditions Stock, 2017, 112 pages.
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