L'autrice revient sur les définitions des sorcières et de leurs histoires qui ont finalement peu à voir avec la sorcellerie en tant que telle — quand elles n'étaient pas de vraies guérisseuses qui faisaient du tort aux médecins officiels.
Si la sorcière est l'archétype de la mauvaise femme, elle fut aussi un bouc émissaire idéal pour se venger ou faire régner la terreur, à travers une chasse qui a plus l'air d'une guerre misogyne. Il suffit de remplacer sorcière par femme et l'on comprend mieux l'esprit des chasseurs en question.
L'essai porte sur cet héritage et les coups portés aux envies d'indépendance, d'autonomie et de liberté des femmes, célibataires, veuves ou vieilles filles, non mères, femmes âgées, aventurières... Bref, toutes ces femmes prétendues dangereuses puisqu'elles représentent une menace. En tout cas, le regard sur elles est désapprobateur quand il n'est pas une injonction à la soumission.
À tel point que Mona Chollet se demande :
Et si le Diable, c'était l'autonomie ?L'autrice, éclairée par l'histoire et le mythe des sorcières, déconstruit les stéréotypes et donne à réfléchir sur les tabous de la situation actuelle des femmes.
Elle dévoile l'envers d'un décor parfois exagérément glamour, comme celui du cinéma, dont par exemple les révélations d'Uma Thurman sur le tournage de Kill Bill qui ont pulvérisé l'image culte du film.
Mona Chollet jette un sort aux diktats et aux interdits — mener une vie indépendante, vieillir, avoir la maîtrise de son corps et de son sexe —, aux "réflexes et condamnations que chacun a intégrés sans y réfléchir, tant la définition étroite de ce que doit être la femme est profondément ancrée".
Comme dit Thérèse Clerc, qui a fondé la Maison des femmes puis la Maison des Babayagas à Montreuil :
"Être sorcière, c'est être subversive à la loi. C'est inventer l'autre loi."
Ces Sorcières sont un essai captivant, indispensable, truffé d'exemples commentés de manière piquante et souvent drôle, malgré le contexte édifiant.
Éditions Zones (label des éditions La Découverte), 2018, 240 pages.
Zones se fixe comme objectif d'être un espace de résistance éditoriale et fonctionne comme un dispositif d’économie mixte, à deux versants, combinant la publication commerciale classique sur papier (avec des livres soignés, véritables objets graphiques et qui font moins mal aux yeux que la version en ligne) et la diffusion en libre accès sur Internet.
Lire aussi ma chronique sur Jouir.
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