Quand un grand écrivain, Delerm, écrit sur un autre grand écrivain, Dickens, c'est retrouver le style juste et subtil du premier pour donner envie de relire le second.
Cette fois-ci, Philippe Delerm s'intéresse aux dernières années de la vie de Dickens, dans une forme plus longue que ses textes courts habituels, mais que l'on retrouve entre deux chapitres pour mettre en exergue une pensée, un détail... Alors une seule phrase résonne longtemps en nous.
Le suicide exalté de Charles Dickens est une réflexion sur les paradoxes et mystères de ce grand écrivain qui cherche les applaudissements au théâtre et la frénésie des tournées mondiales jusqu'au burn-out, alors qu'il est déjà comblé par le succès de ses livres.
Que fuit-il ? Que recherche-t-il ?
Delerm nous fait surtout ressentir cette fameuse atmosphère à la Dickens avec la sensibilité que nous lui connaissons.
Un régal de lecture !
D'où tenait-il cette certitude de séduire et de tenir en haleine de la même manière en suscitant le rire ou en faisant frissonner de peur ? C'est le prodigieux côtoiement de ces deux univers en apparence antagonistes qui constitue Charles Dickens. Cela passe par l'écriture bien sûr, un style efficace qui ne se perd pas dans des parenthèses dilatoires; une tenue, une exigence de vocabulaire allant parfois jusqu'à la préciosité, et permettant au plus fort d'une action ce petit retrait, un détachement, une ironie qui font du lecteur un complice.
Ne dirait-on pas que Delerm parle de lui-même avec cette "ironie qui font du lecteur un complice" ?
Le Seuil, 2025, 132 pages.
D'autres chroniques sur les livres de Philippe Delerm :
- Les Gens sont comme ça et autres petites phrases métaphysiques ;
- Les instants suspendus ;
- New York sans New York ;
- La vie en relief ;
- L'extase du selfie et autres gestes qui nous disent ;
- Et vous avez eu beau temps ? La perfidie ordinaire des petites phrases ;
- Journal d'un homme heureux ;
- Je vais passer pour un vieux con et autres petites phrases qui en disent long ;
- Elle marchait sur un fil ;
- Les eaux troubles du mojito et autres belles raisons d'habiter la terre.
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